Audrey, 22 ans, est stagiaire masseur-kinésithérapeute dans le service de réadaptation fonctionnelle de l’hôpital. Signe distinctif : son labrador de 3 ans, Milka, l’accompagne sur le plateau technique. Audrey est déficiente visuelle. Son champ de vision réduit l’amène à se déplacer à l’extérieur et sur des trajets nouveaux avec son chien au harnais. Elève kiné en 3e année à l’IFMK Guinot, son parcours d’apprentissage est classique, même si son école impose à l’entrée des tests relatifs au handicap visuel.
La présence d’un chien guide a marqué un réel bénéfice en MPR. Et pourtant, il n’est pas si facile de trouver un stage pour Audrey. La perception de la déficience fait planer un doute sur la sécurité du patient, l’appréhension d’une prise en charge incomplète…Avec sa tutrice kiné et l’équipe MPR, un travail spécifique d’adaptation à la situation de rééducation avec patient debout a été réalisé.
En effet, la kinésithérapie neurologique implique des soins et échanges avec des patients ayant du mal à communiquer de par leurs troubles cognitifs. Et, de fait, avec Audrey, les patients doivent s’exprimer davantage pour compenser le manque de constatation visuelle lors des exercices. Audrey ayant besoin de plus de contact physique pour réguler les postures et apprendre les bonnes prises, elle doit se surpasser en trouvant la manière de tenir le patient lors de la marche et la technique tactile adéquate pour n’accompagner que le côté à rééduquer.
L’équipe s’est bien entendu interrogée mais a bien vite constaté, après 2 ou 3 adaptations lumière et logistique gérées par Audrey, que la nouvelle stagiaire assurait !
Audrey explique aux patients la façon dont elle va contrôler la rééducation si son handicap entraîne une spécificité ou une incompréhension.
Et même si Milka se fait très discrète, elle est vite devenue un atout. Milka attire les regards, la curiosité. C’est une attraction positive ! Voire mieux encore : on a eu recours à elle pour certains patients : motiver l’un peu engagé dans sa rééducation, stimuler les échanges avec un autre… L’animal dégage une empathie certaine et émet des signaux d’encouragement, de connivence, qui permettent une prise de contact différente.
In fine, le handicap impose de la créativité, et la présence d’un chien est un plus dans l’approche, pour entrer plus facilement en communication dans la relation soigné-soignant.
Le handicap d’Audrey établit un lien particulier avec ses patients. Sa dysfonction visuelle lui procure une expérience, un niveau de compréhension assez proche de leurs propres dysfonctionnements physiques. Ils discutent plus facilement, réfléchissent ensemble à des stratégies, luttent ensemble contre le manque de confiance en soi…
L’enthousiasme de ses tuteurs et la cohésion de l’équipe MPR ont été un gros plus pour surmonter les difficultés inhérentes au handicap dans la prise en charge de la rééducation neurologique.
L’objectif d’Audrey : être une kiné comme les autres, et permettre aux autres d’appréhender la réalité du handicap en milieu professionnel, qui n’est, finalement, pas si complexe…